ACTU : Sarkozy, chez les cheminots, s’emmêle les pinceaux...
FRANCE - Annonce choc… ou boulette maousse ? En se rendant vendredi matin dans les ateliers du Landy, à Saint-Denis, près de Paris, où sont révisés TGV, TER, Eurostar et
trains Corail, pour montrer ses muscles aux cheminots («La rue, elle ne fera pas plier, parce que nous sommes dans une démocratie»), Nicolas Sarkozy a surtout montré quelques lacunes
dans le dossier de la réforme des régimes spéciaux de retraite, pourtant phare de son programme. Quelque peu malmené par les salariés présents (le Président a essuyé le refus ostensible de lui
serrer la main d’un salarié), Sarkozy, entouré d’une nuée de caméras, s’engage dans une discussion tendue, au milieu de laquelle il finit par lancer : «Les 40 ans [d’annuités]
s’appliqueront à tout le monde, en revanche, les bonifications, les décotes, moi je pense que tout ceci ne peut s’appliquer que pour ceux qui ne sont pas déjà rentrés à la SNCF.» Une rumeur
monte dans la foule, un syndicaliste de FO s’étonne : «Ah, mais ça c’est nouveau !» C’est même énorme.
Le principe de la décote (Réduction plus que proportionnelle de la pension pour ceux qui n’auraient pas cotisé pendant le nombre d’années requises) fait partie des trois piliers intangibles du
document d’orientation qui a été remis aux syndicats le 10 octobre, au même titre que la durée de cotisation à 40 ans pour la retraite à taux plein et l’indexation des pensions sur les
prix. En affirmant que les décotes ne s’appliqueront qu’aux nouveaux entrants et ne toucheront pas les cheminots en poste, Sarkozy lâche donc une annonce explosive.
Les médias présents, Reuters, AFP, France 3 reprennent la phrase. Le souci, c’est qu’au même moment, chez le ministre du Travail Xavier Bertrand, qui concluait une série de rencontres avec
les syndicats, les organisations de salariés se voient proposer un tout autre discours. Au point de sortir en déplorant des négociations bloquées.
A la SNCF, le discours est un peu embarrassé : «Je pense que c’est une boulette», glisse un cadre, la direction de l’entreprise préférant pudiquement s’abstenir de toute réaction
officielle. Les syndicats, eux, s’en donnent à cœur joie. L’Unsa : «Si le Président le dit, c’est forcément lui qui a raison. Nous n’imaginons pas un instant qu’il ne connaisse pas le
dossier.»
Prenant Sarkozy au pied de la lettre, Eric Falempin, secrétaire national de FO, se délectait lui d’une grande victoire : «On vient de gagner sur un des trois points les
plus importants.» Même discours de façade de la CGT : «J’ai pris acte», assure Didier Le Reste, secrétaire de la fédération des cheminots, qui lâche : «Quand même, tout cela n’est pas très
sérieux. A force d’agitation chronique, à force de vouloir parler sur tout, il en balance pas mal des bourdes. Il s’est déplacé avec une compagnie de CRS, une nuée de caméras, pour un exercice de
communication qui relève de la provocation, sur des sujets qui sont quand même sérieux et qui méritent autre chose que ça…»
Dans la soirée, l’entourage de Xavier Bertrand a répondu à Libération que le ministère «confirmait les éléments du document d’orientation du 10 octobre». C’est dit élégamment,
pour démentir le Président…
Boulette ou calcul politique ? En visite dans les ateliers du Landy, à Saint-Denis hier matin, le président de la
république a lâcher une phrase choc, lourde de sous-entendus : «Les 40 ans de travail s’appliqueront à tout le monde : en revanche, les bonifications, les décotes, moi je pense que
tout ceci ne peut s’appliquer que pour ceux qui ne sont pas déjà rentrés à la SNCF.» Depuis, Xavier Bertrand essaye d'essuyer les plâtres. "Merde, finalement, je crois que j'ai dit
une connerie... il va me falloir une belle pirouette verbale pour me sortir de ce guêpier ! mais il faut me comprendre aussi : Pas de bain de foule, le stress de recontrer les cheminots, un type
qui refuse de me serrer la main... j'ai perdu mes moyens."
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